L’épopée de la NES
1. Arrivée de la première console
« Les anecdotes que je vais raconter viennent exactement de ce qu’il me reste en mémoire. C’est lointain. Donc s’il y a des erreurs, mea culpa. »
Au début des années 90, le jeu vidéo, c’était un truc d’extraterrestre. Très peu répandu. J’me souviens même pas avoir vu une pub à la télé pour la NES. Mais en même temps, la télé chez moi, c’était trois chaînes, une seule télé familiale, et je suis même pas sûr qu’on avait le droit de la regarder en tant qu’enfants. Elle était dans la chambre des parents, pas dans le salon. L’ambiance.
Mon premier contact avec les jeux vidéo, c’est un Noël. J’ai cinq ou six ans. Je déballe un cadeau qui coûte une fortune pour l’époque — merci ma tante — sans trop comprendre ce que c’est. J’ai probablement dit merci, posé la boîte dans un coin, et je suis retourné jouer avec mon caca ou des Tortues Ninja. L’insouciance totale.

Et cette console ? Je n’en verrai pas la couleur tout de suite. Parce que ouais, une seule télé dans le foyer, pas facilement dispo. C’est mes parents qui en ont profité les premiers. Putain… je me suis fait racketter ma console par mes propres darons. La honte.
Peu après, ma petite sœur est arrivée. On a déménagé pour une maison un peu plus grande. Et là, enfin : une télé dans le salon. Le Graal. J’ai pu goûter aux graphismes époustouflants de la NES. Enfin… juste un peu. Le padre y avait pris goût. J’passais autant de temps à jouer qu’à le regarder jouer, ce fumier.
2. La manette de la douleur
Les jeunes d’aujourd’hui n’ont aucune idée d’à quel point la manette de la NES, c’était un instrument de torture. Un putain de rectangle avec des coins durs comme des angles de table Ikea. Aucune ergonomie. Tu jouais une heure, t’avais des bleus dans les paumes. Les boutons ? Durs comme du béton. Et on adorait ça quand même. Bande de dégénérés heureux qu’on était.
3. MA télé

À l’époque, l’entreprise où bossait mon père offrait un cadeau de Noël aux enfants des salariés. Il y avait une liste par tranche d’âge. Et un jour, sur la liste :
Téléviseur – 36 cm
(Putain, 36 cm. Aujourd’hui c’est la taille d’un écran d’interphone. Mais à l’époque, c’était une dinguerie.)
Tube cathodique, antenne télescopique, deux chaînes et demi captées dans le meilleur des cas. Et surtout : MA télé, dans MA chambre.
Autant te dire que là, j’ai commencé à poncer de la console. Le soir, les week-ends… Dès que j’étais pas dehors à faire du sport ou des conneries, j’étais tout sage dans ma piaule.
Tu connais ce moment de filouterie : les parents dorment (du moins tu crois), tu gardes la télécommande à portée de main, et au moindre bruit suspect : paf, télé éteinte, plongeon sous la couette à une vitesse de ninja cocaïné.
4. Mario le plombier chelou
J’ai donc commencé du Mario Bros, c’était le jeu que j’avais eu avec la console pendant le Noël.
Comment décrire mes impressions sur Mario… Si tu veux, le plombier italien moustachu en salopette je trouvais pas trop ça épique. J’ai grandi avec des films plein de violence et de machisme exacerbé, alors il m’en fallait un peu plus entre les doigts.
Non parce que dans ma tête, dans un jeu tu veux vivre les trucs épiques que tu vois dans les films, mais cette fois tu diriges le personnage donc c’est un peu toi le héros au final. Et bon, disons qu’être un rital en surpoids qui doit réparer des tuyauteries, c’était pas vraiment mon idéal du héros !

En plus il est louche ce jeu. Tu bouffes des champignons, ça te fais changer de couleur et tu crache du feu… méfiez-vous! J’ai jamais compris le but non plus. Tu traverse toute la carte, tu rentres dans des tuyaux pour aller dans les égouts (quelle idée encore?) t’écrase des champignon avec des yeux et des pieds, des tortues qui marchent à 2 pattes…. Tout ça pour *roulement de tambour* sauter sur un mât qui porte un drapeau!
ah bah putain ça donne vraiment envie de se surpasser cette histoire. Moi je ne rêvais que d’un truc, c’était de péter un carré de brique, qu’il y ai une M60 qui tombe, que ce tocard de Mario se mette un bandeau rouge sur le front et qu’il dessoude tout ce qu’il croise!
Au passage, histoire vrai, on pouvait jouer à deux. Je ne sais plus trop comment ça se présentait, mais un joueur avait Mario et l’autre Luigi. Et bah c’est le seul jeu où je ne débattais pas pour jouer avec le mec censé être le héros. D’habitude je voulais, comme tout le monde, prendre le porte étendard de la licence. Là non. Luigi était plus maigre, il me paraissait plus apte à servir. Mario me stressait avec sa surcharge pondérale.
5. Les Schtroumpfs et les Gaulois et les catapultes
Ensuite j’avais aussi les schtroumpfs, qui était cool, je ne me souviens plus trop les détails mais il y avait plusieurs map qui représentait des mini-jeux. Fallait ramasser des trucs. C’était sympa et je me souviens que j’aimais bien.
J’avais également Astérix, que j’aimais beaucoup en BD déjà. Là on commence à être bien. On est un gaulois, on mets des tartes à des envahisseurs, on a un pied dans l’épique.
Et enfin, le jeu dont je ne comprenais pas un seul putain de texte mais que j’adorais: defender of the crown.

Ce jeu était génial, mais putain tout était en anglais et forcément, moi gamin je n’y bitais pas un traitre mot ! (mon père et son niveau scolaire de gosse de campagne des années 60 non plus d’ailleurs). On était en Angleterre, il y avait des châteaux à conquérir, des tournois à gagner, des princesses à sauver avec des chevaliers et des catapultes. J’étais comme un fou. D’ailleurs ces enculés pourquoi ils n’ont pas fait le royaume de France au lieu des putains de rosbeef ? C’est passé pas loin de la perfection.
6. Les cousins et le complot
Ce qui était génial dans le monde d’avant, c’est que t’avais des potes ou de la famille qui avait la même console (vu qu’il n’y avait pas tellement de choix!) et du coup on s’échangeait les cartouches de jeu. Quand j’allais chez mes cousins ( 2 frangins, Mathieu et Baptiste, avec qui j’ai passé pas mal de temps étant jeune), je découvrais donc des nouveaux jeux que je n’avais pas et ils avaient le pistolet avec DUCK HUNT. C’était terrible, tu flinguais les petits canards et t’avais un chien qui te les rapportait!

Ils avaient aussi un jeu de foot… mais quand j’y repense quelle époque on a vécu! C’était certainement le premier jeu de foot jamais inventé sur une console grand public. Les joueurs putain ils avaient tous la même gueule de connards et une posture de merde! En plus je suis même pas sûr qu’ils étaient 11 par équipe sur le terrain!
Tu taclais de partout, dans mes souvenir, l’arbitre était absent du jeu, t’avais tes joueurs qui restaient coucher sur la pelouse. Je sais pas ce qui leur est passé par la tête aux développeurs franchement mais je vois bien un jap’ un peu stressé, en pleine réunion te sortir une dinguerie du genre : « J’ai une idée! on va faire un jeu de soccer, mais comme dans ce sport de pédale les arbitres cassent les couilles à siffler pour rien, on ne va pas en mettre! » (Et c’est pas le pire que j’ai connu, je vous raconterais!)

Et donc on se tuait les yeux, à 3 ou 4 sur un écran de 36cm. Oui parce que parfois j’avais ma sœur qui essayait de s’intégrer. Mais on devait paraître tellement venu d’une autre planète à ses yeux de petite fille sérieuse, que je suis sûr qu’elle faisait des études anthropologique en douce…
Ils avaient aussi un jeu de bagnole, où on pouvait jouer à deux. Du coup on faisait des courses, normal. Mais encore aujourd’hui je ne sais toujours pas pourquoi ni comment : y’a que 2 putains de boutons sur la manette, dont un pour accélérer, j’avais beau écraser ce bouton de merde de toutes mes forces, je n’ai jamais réussi à gagner une seule course! Et en plus ces 2 enculés ils se foutaient de ma gueule ! « Mais accélère ! appuie sur A ! Appuie sur A ! » « Mais t’as oublié le frein ! » et plus ils gueulaient et se marraient, plus ça me gonflait et plus j’appuyais comme un mongole. Je m’énervais parce que j’étais (et je le suis toujours !) persuadé qu’ils avaient une astuce pour rouler plus vite ! Mais ils se foutaient de ma gueule et moi je prenais des branlés à chaque fois qu’on jouait, et JAMAIS ils ne m’ont vendu la mèche sur le fait qu’il y avait une astuce! Les gars, ça fait 30 ans, vous pouvez peut être me donner le fin mot de cette histoire!
Autre jeu qui me revient et auquel nous avons beaucoup joué tous les 3: Track and Field 2
C’est un jeu multi-sport de jeux olympiques de mémoire. Tout y était ! Le lancer de marteau, le saut de haie, saut en longueur, concours de bras de fer, taekwondo et plein d’autre dont je ne me souviens pas et certain que je suis persuadé de ne jamais avoir joué.

Putain on choppait des ampoules aux mains pour se la mettre à ce jeu ! Je me souviens qu’il fallait appuyer rapidement de façon alternative sur A puis B puis A etc. Et plus tu vas vite, plus ton mec il court vite (ou pousse fort suivant le sport) ! Alors nous, bande de débiles, au début on était calme, on appuyait juste avec le pouce et on essayait d’aller vite. Et petit à petit on a développé des techniques de sioux ! Donc on a commencé à mettre la manette sur le côté, et appuyer rapidement avec l’index et le majeur.
Mais comme on était des demeurés finis, on en voulait toujours plus alors on au final on s’est retrouvé à frotter la manette comme si on allait y faire sortir un putain de génie en babouche ! Ça nous a filé des cloques bordel tellement qu’on frottait comme des autistes !
Qu’est ce qu’on a pu rigoler et les parents ils voyaient nos mains défoncées à cause d’un jeu tout pourri. Qu’est ce qu’il devait nous trouver cons franchement. c’était vraiment une époque formidable.
Parce qu’une fois qu’on s’était détruit le cerveau et les yeux, on allait dehors se faire un foot pour se mettre des gros ballons dans la courge. Ou éclater des trucs avec des pétards suivant l’humeur (le « mood » diraient les FDP modernes)…

7. La galère des anciens
À l’époque : pas de sauvegarde. Tu veux finir un jeu ? Tu joues jusqu’à la mort. Sinon tu laisses la console allumée. Merci EDF et les centrales nucléaires.
Et quand un jeu plantait ? Tu soufflais dans tous les trous. Le port cartouche, l’entrée manette, la prise secteur… c’était devenu un rite païen. Tu souffles, tu pries, tu rebranches. Et tu recommences.
T’as connu ça toi aussi ?
Souffler dans la cartouche, jouer en cachette, te faire éclater par ton cousin ?
Balance ton meilleur souvenir en commentaire.

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